Mauvais sang - Léo Ferré

Mauvais sang - Léo Ferré

Альбом
Une saison en enfer
Год
1992
Длительность
943330

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Mauvais sang

Léo Ferré

J’ai de mes ancêtres gaulois l’oeil bleu blanc, la cervelle étroite,

et la maladresse dans la lutte.

Je trouve mon habillement aussi barbare que le

leur.

Mais je ne beurre pas ma chevelure

Les Gaulois étaient les écorcheurs de bêtes, les brûleurs d’herbes les plus

ineptes de leur temps

D’eux, j’ai: l’idolâtrie et l’amour du sacrilège;

- oh!

tous les vices, colère,

luxure, — magnifique, la luxure;

- surtout mensonge et paresse

J’ai horreur de tous les métiers.

Maîtres et ouvriers, tous paysans, ignobles

La main à plume vaut la main à charrue.

— Quel siècle à mains!

— Je n’aurai jamais ma main.

Après, la domesticité mène trop loin

L’honnêteté de la mendicité me navre.

Les criminels me dégoûtent comme des

châtrés: moi, je suis intact, et ça m’est égal

Mais!

qui a fait ma langue perfide tellement, qu’elle ait guidé et sauvegardé

jusqu’ici ma paresse?

Sans me servir pour vivre même de mon corps, et plus oisif que le crapaud,

j’ai vécu partout.

Pas une famille d’Europe que je ne connaisse

— J'entends des familles comme la mienne, qui tiennent tout de la déclaration

des Droits de l’Homme

— J'ai connu chaque fils de famille!

Si j’avais des antécédents à un point quelconque de l’histoire de France!

Mais non, rien

Il m’est bien évident que j’ai toujours été race inférieure.

Je ne puis

comprendre la révolte

Ma race ne se souleva jamais que pour piller: tels les loups à la bête qu’ils

n’ont pas tuée

Je me rappelle l’histoire de la France fille aînée de l'Église

J’aurais fait, manant, le voyage de terre sainte;

j’ai dans la tête des routes

dans les plaines souabes, des vues de Byzance, des remparts de Solyme;

le culte de Marie, l’attendrissement sur le crucifié s'éveillent en moi parmi

mille féeries profanes

— Je suis assis, lépreux, sur les pots cassés et les orties, au pied d’un mur

rongé par le soleil

— Plus tard, reître, j’aurais bivaqué sous les nuits d’Allemagne

Ah!

encore: je danse le sabbat dans une rouge clairière, avec des vieilles et

des enfants

Je ne me souviens pas plus loin que cette terre-ci et le christianisme.

Je n’en finirais pas de me revoir dans ce passé

Mais toujours seul;

sans famille;

même, quelle langue parlais-je.

Je ne me vois jamais dans les conseils du Christ;

ni dans les conseils des

Seigneurs, — représentants du Christ

Qu'étais-je au siècle dernier: je ne me retrouve qu’aujourd’hui.

Plus de vagabonds, plus de guerres vagues.

La race inférieure a tout couvert —

le peuple, comme on dit, la raison;

la nation et la science

Oh!

la science!

On a tout repris.

Pour le corps et pour l'âme, — le viatique,

— on a la médecine et la philosophie, — les remèdes de bonnes femmes et les

chansons populaires arrangés

Et les divertissements des princes et les jeux qu’ils interdisaient!

Géographie, cosmographie, mécanique, chimie…

La science, la nouvelle noblesse!

Le progrès.

Le monde marche!

Pourquoi ne

tournerait-il pas?

C’est la vision des nombres.

Nous allons à l’Esprit.

C’est très-certain,

c’est oracle, ce que je dis.

Je comprends, et ne sachant m’expliquer sans

paroles païennes, je voudrais me taire

Le sang païen revient!

L’Esprit est proche, pourquoi Christ ne m’aide-t-il pas,

en donnant à mon âme noblesse et liberté

Hélas!

l'Évangile a passé!

l'Évangile!

L'Évangile

J’attends Dieu avec gourmandise.

Je suis de race inférieure de toute éternité

Me voici sur la plage armoricaine.

Que les villes s’allument dans le soir

Ma journée est faite;

je quitte l’Europe.

L’air marin brûlera mes poumons;

les climats perdus me tanneront

Nager, broyer l’herbe, chasser, fumer surtout;

boire des liqueurs fortes comme

du métal bouillant, — comme faisaient ces chers ancêtres autour des feux

Je reviendrai, avec des membres de fer, la peau sombre, l’oeil furieux:

sur mon masque, on me jugera d’une race forte.

J’aurai de l’or:

je serai oisif et brutal

Les femmes soignent ces féroces infirmes retour des pays chauds

Je serai mêlé aux affaires politiques.

Sauvé

Maintenant, je suis maudit, j’ai horreur de la patrie.

Le meilleur,

c’est un sommeil bien ivre, sur la grève

On ne part pas.

— Reprenons les chemins d’ici, chargé de mon vice,

le vice qui a poussé ses racines de souffrance à mon côté, dès l'âge de raison

— qui monte au ciel, me bat, me renverse, me traîne

La dernière innocence et la dernière timidité.

C’est dit.

Ne pas porter au

monde mes dégoûts et mes trahisons

Allons!

La marche, le fardeau, le désert, l’ennui et la colère

A qui me louer?

Quelle bête faut-il adorer?

Quelle sainte image attaque-t-on?

Quels coeurs briserai-je?

Quel mensonge dois-je tenir?

— Dans quel sang

marcher?

Plutôt, se garder de la justice.

— La vie dure, l’abrutissement simple,

— soulever, le poing desséché, le couvercle du cercueil, s’asseoir, s'étouffer

Ainsi point de vieillesse, ni de dangers: la terreur n’est pas française

— Ah!

je suis tellement délaissé que j’offre à n’importe quelle divine image

des élans vers la perfection

Ô mon abnégation, ô ma charité merveilleuse!

ici-bas, pourtant!

De profundis

Domine, suis-je bête!

Encore tout enfant, j’admirais le forçat intraitable sur qui se referme

toujours le bagne;

je visitais les auberges et les garnis qu’il aurait sacrés

par son séjour;

je voyais avec son idée le ciel bleu et le travail fleuri de la

campagne;

je flairais sa fatalité dans les villes

Il avait plus de force qu’un saint, plus de bon sens qu’un voyageur — et lui,

lui seul!

pour témoin de sa gloire et de sa raison

Sur les routes, par les nuits d’hiver, sans gîte, sans habits, sans pain,

une voix étreignait mon coeur gelé: «Faiblesse ou force: te voilà,

c’est la force

Tu ne sais ni où tu vas ni pourquoi tu vas, entre partout, réponds à tout.

On ne te tuera pas plus que si tu étais cadavre.»

Au matin j’avais le regard si perdu et la contenance si morte, que ceux que

j’ai rencontrés ne m’ont peut-être pas vu

Dans les villes la boue m’apparaissait soudainement rouge et noire,

comme une glace quand la lampe circule dans la chambre voisine,

comme un trésor dans la forêt!

Bonne chance, criais-je, et je voyais une mer de flammes et de fumée au ciel;

et, à gauche, à droite, toutes les richesses flambant comme un milliard de

tonnerres

Mais l’orgie et la camaraderie des femmes m'étaient interdites.

Pas même un

compagnon

Je me voyais devant une foule exaspérée, en face du peloton d’exécution,

pleurant du malheur qu’ils n’aient pu comprendre, et pardonnant!

— Comme Jeanne d’Arc!

— «Prêtres, professeurs, maîtres, vous vous trompez en me livrant à la justice.

Je n’ai jamais été de ce peuple-ci;

je n’ai jamais été chrétien;

je suis de la race qui chantait dans le supplice;

je ne comprends pas les lois;

je n’ai pas le sens moral, je suis une brute: vous vous trompez… «Oui, j’ai les yeux fermés à votre lumière.

Je suis une bête, un nègre

Mais je puis être sauvé.

Vous êtes de faux nègres, vous maniaques, féroces,

avares

Marchand, tu es nègre;

magistrat, tu es nègre;

général, tu es nègre;

empereur,

vieille démangeaison, tu es nègre: tu as bu d’une liqueur non taxée,

de la fabrique de Satan

— Ce peuple est inspiré par la fièvre et le cancer.

Infirmes et vieillards sont

tellement respectables qu’ils demandent à être bouillis

— Le plus malin est de quitter ce continent, où la folie rôde pour pourvoir

d’otages ces misérables.

J’entre au vrai royaume des enfants de Cham

Connais-je encore la nature?

me connais-je?

— Plus de mots.

J’ensevelis les morts dans mon ventre.

Cris, tambour, danse,

danse, danse, danse!

Je ne vois même pas l’heure où, les blancs débarquant,

je tomberai au néant

Faim, soif, cris, danse, danse, danse, danse!

Les blancs débarquent.

Le canon!

Il faut se soumettre au baptême, s’habiller,

travailler

J’ai reçu au coeur le coup de grâce.

Ah!

je ne l’avais pas prévu!

Je n’ai point fait le mal.

Les jours vont m'être légers, le repentir va m'être

épargné.

Je n’aurai pas eu les tourments de l'âme presque morte au bien,

où remonte la lumière sévère comme les cierges funéraires

Le sort du fils de famille, cercueil prématuré couvert de limpides larmes.

Sans doute la débauche est bête, le vice est bête;

il faut jeter la pourriture

à l'écart

Mais l’horloge ne sera pas arrivée à ne plus sonner que l’heure de la pure

douleur!

Vais-je être enlevé comme un enfant, pour jouer au paradis dans

l’oubli de tout le malheur!

Vite!

est-il d’autres vies?

— Le sommeil dans la richesse est impossible.

La richesse a toujours été bien

public

L’amour divin seul octroie les clefs de la science.

Je vois que la nature n’est

qu’un spectacle de bonté

Adieu chimères, idéals, erreurs.

Le chant raisonnable des anges s'élève du

navire sauveur: c’est l’amour divin

— Deux amours!

je puis mourir de l’amour terrestre, mourir de dévouement.

J’ai laissé des âmes dont la peine s’accroîtra de mon départ!

Vous me choisissez parmi les naufragés;

ceux qui restent sont-ils pas mes amis?

Sauvez-les!

La raison m’est née.

Le monde est bon.

Je bénirai la vie.

J’aimerai mes frères.

Ce ne sont plus des promesses d’enfance

Ni l’espoir d'échapper à la vieillesse et à la mort.

Dieu fait ma force,

et je loue Dieu

L’ennui n’est plus l’amour.

Les rages, les débauches, la folie, dont je sais

tous les élans et les désastres, — tout mon fardeau est déposé

Apprécions sans vertige l'étendue de mon innocence

Je ne serais plus capable de demander le réconfort d’une bastonnade.

Je ne me crois pas embarqué pour une noce avec Jésus-Christ pour beau-père

Je ne suis pas prisonnier de ma raison.

J’ai dit: Dieu.

Je veux la liberté dans

le salut: comment la poursuivre?

Les goûts frivoles m’ont quitté

Plus besoin de dévouement ni d’amour divin.

Je ne regrette pas le siècle des

moeurs sensibles.

Chacun a sa raison, mépris et charité: je retiens ma place au

sommet de cette angélique échelle de bon sens

Quant au bonheur établi, domestique ou non… non, je ne peux pas.

Je suis trop dissipé, trop faible.

La vie fleurit par le travail,

vieille vérité: moi, ma vie n’est pas assez pesante, elle s’envole et flotte

loin au-dessus de l’action, ce cher point du monde

Comme je deviens vieille fille, à manquer du courage d’aimer la mort!

Si Dieu m’accordait le calme céleste, aérien, la prière, — comme les anciens

saints

— Les saints!

des forts!

les anachorètes, des artistes comme il n’en faut plus!

Farce continuelle!

Mon innocence ferait pleurer.

La vie est la farce à mener

par tous

Assez!

Voici la punition.

— En marche!

Ah!

les poumons brûlent, les tempes grondent!

la nuit roule dans mes yeux,

par ce soleil!

le coeur… les membres…

Où va-t-on?

au combat?

Je suis faible!

les autres avancent.

Les outils,

les armes… le temps…

Feu!

feu sur moi!

Là!

ou je me rends.

— Lâches!

— Je me tue!

Je me jette aux

pieds des chevaux!

Ah…

— Je m’y habituerai

Ce serait la vie française, le sentier de l’honneur!

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